mercredi 31 octobre 2012

TD personnes - Le nom


Le nom n’est pas neutre : il peut en effet être source de prestige (noms célèbres), de préjudice (nom ridicule ou lourd à porter) ou de profit (nom commercial)
Rattachement d’une personne à un groupe social, à une histoire familiale.
Désigne souvent l’origine territoriale (région, pays étranger).

 
Double tendance actuelle : traduction des idéologies modernes 
égalité sexuelle et entre les filiations + montée en puissance de la volonté. Du nom patronymique (nom transmis par le père) au nom de famille (loi du 4 mars 2002). Vocation égalitaire du nom de famille.
patrimonialisation du nom, commercialisation du nom


Attribution du nom :

1° par l’effet de la filiation : 311-21. Liberté de choix. (Avant 2005 : conception patriarcale, l’enfant né de parents mariés portait systématiquement le nom du père)

Section IV du Titre XII consacré à la filiation.

Consécration du choix du double nom

Al . 3 : unité de la fratrie

Cas particulier de l’adoption : Adoption plénière (règles classiques), adoption simple (adjonction du premier nom de l’adoptant à celui de l’enfant)

2° mariage : droit réciproque d’user le nom du conjoint (déduction de l’art. 300 C. civ.)

3° attribution administrative : cas des enfants sans filiation, c’est l’officiel d’état civil qui attribue un nom.

 
Nature juridique du nom :

D’abord un instrument de police civile : immatriculation de la personne, élément d’identification de la personne ; d’où découle le principe d’immutabilité du nom (art. 1 loi 6 fructidor an II).
Ensuite, une marque de la filiation et de l’état familial : enfant adopté, état d’époux…
Enfin, un droit de la personnalité

 

Eléments de correction de la dissertation

D’abord définir et distinguer droit patrimonial/droit extrapatrimonial

Dt patrimonial : valeur pécuniaire/patrimoine
Caractéristiques : cessibilité (donner, échanger, vendre), disponibilité (peut être l’objet d’une convention), transmissibilité (héritage), saisissabilité (désintéressement d’un créancier), prescriptibilité

Dt extrapatrimonial : autre ordre de valeur/ non patrimoine
Caractéristiques : incessibilité, indisponibilité, imprescriptibilité, intransmissibilité, insaisissabilité.

 Le nom fait incontestablement partie de la seconde catégorie.
-         Instrument de police et d’identification de la personne. Inscription de l’individu dans une histoire familiale
-         Attribution certes plus libre mais étroitement règlementée
-         Ne peut évidemment pas faire l’objet d’une saisie pour désintéresser un créancier
-         Ne se transmet pas, au sens où ne s’établit pas un transfert de valeurs du patrimoine du défunt à celui/ ceux de ses héritiers
-         Est imprescriptible puisqu’il ne se perd pas son non-usage

Même si certains éléments viennent jeter le trouble. Idée générale d’une patrimonialisation des droits de la personnalité. Nom associée à une marque, une personne célèbre


I - L’apparente extrapatrimonialité du nom


A – Le nom, institution de police civile

Elément d’identification de la personne : procédé d’identification de la personne

Règles d’attribution du nom)

L. 6 fructidor an II – Relative immutabilité du nom


Mais pas uniquement, le nom est aussi un droit ; au sens où son titulaire peut exiger des tiers son respect et au besoin en saisissant un juge.

 
B – Le nom, droit extrapatrimonial

Autre valeur que la valeur pécuniaire : marque extérieur, signe d’une filiation à une famille. Nom inhérent à la personne humaine

Imprescriptibilité

Inaliénable

N’est pas un droit de propriété.

-         Ne peut appartenir à plusieurs personnes en même temps

-         Intransmissible : n’est pas l’œuvre du défunt, c’est la loi

 
II – Les dessous d’une patrimonialité du nom

A – L’usage commercial du nom

Le nom, utilisé à des fins commerciales, peut avoir une valeur pécuniaire importante.

Le nom constitue alors un droit patrimonial.

Elément attractif de la clientèle

Association du nom à la marque : distinction alors très nette entre le nom, institution de police civile et droit extrapatrimonial et le nom commercial lequel. Le nom de famille devient le nom commercial

Possible autorisation d’utiliser son nom à des fins commerciales, cessibilité du nom

Affaire Bordas : Com., 12 mars 1985

 
B- La particularité du pseudonyme

Invention de son auteur : de son vivant, celui-ci en a la propriété exclusive.

Prescription acquisitive : en devient la propriété exclusive de son auteur par son usage paisible, prolongé… (Paris, 15 septembre 1999).

Accord de celui-ci pour qu’un tiers, même de la même famille l’utilise (TGI Paris, 2 mars 1973)

Transmissible : à la mort de l’auteur du pseudonyme, les héritiers sont habilités à le défendre.

TD obligations - séance 4 : les nouveaux moyens de protection du consentement


BALDUS, "La Bourse", 1860.
 
Nouveaux moyens de protection du consentement (qui doivent être distingués des moyens traditionnels de protection du consentement en référence à la théorie des vices du consentement).

 Idée : développer des techniques préventives de protection du consentement, mettre les contractants dans les meilleures dispositions (être suffisamment informé, éclairé, bénéficier du temps de la réflexion…). Promouvoir une politique d’information des contractants. Plutôt que de sanctionner a posteriori, mieux vaut prévenir !

 Contexte : société « d’hyperconsommation » (selon l’expression de G. LIPOVETSKY dans son essai « Le bonheur paradoxal »), « ultra-marchande », fabrication de produits toujours plus complexes.

Bibliographie : Dany-Robert DUFOUR, « Le divin Marché » + John Kenneth GALBRAITH, « L’ère de l’opulence » et « Le nouvel Etat industriel »

 Développement de nouvelles techniques de publicité, de marketing, de pratiques contractuelles de masse, apparition de méthodes de vente « agressives ».

Face à cela, la théorie des vices du consentement semble insuffisante (« rendement social médiocre », TERRE) => Institutionnalisation de mesures préventives.

 
Mesure principale : OBLIGATION GENERALE D’INFORMATION

1° Initialement, cette obligation ne prend corps que dans un texte spécial. On considère alors, que dans une société libérale, le devoir de tout individu est de s’informer soi-même (adage emptor debet esse curiosus).
2° Mais au milieu du 20ème siècle, la jurisprudence va progressivement dégager un principe général, en se fondant de l’art. 1134 al 3 et la notion de bonne foi.

Diverse dans ses applications (devoir de conseil, de mise en garde, obligation de renseignements…)

 Condition :il doit s’agir d’une information pertinente

 Application naturelle de l’OPI : rapports entre professionnel et particulier

Si l’information relève de la spécialité du professionnel, il est censé connaitre l’information en question (même s’il dit l’ignorait)

 Preuve :

Principe art. 9 : c’est sur le créancier de l’information que repose la charge de la preuve

Mais, s’agissant d’un fait négatif, renversement de la charge de la preuve. C’est donc celui qui a tu l’information qui doit apporter la preuve de l’exécution de l’obligation d’information (Civ 1ère, 25 février 1997). 

 Sanction : droit commun (nullité du contrat)



Eléments de correction commentaire d’arrêts comparé

 Dans la décision du 15 mai 2002, un particulier entend se prévaloir du défaut d’information sur le caractère accidenté d’un véhicule automobile acheté auprès d’un professionnel. Dans l’espèce du 17 janvier 2007, c’est un profane, cette fois-ci en position de vendeur, qui sollicite la nullité de la vente d’un bien immobilier, pour défaut absence d’information sur la valeur du bien acquis.

 Les deux affaires mettent aux prises une relation contractuelle entre un particulier et un professionnel et tendent toutes les deux à préciser les contours de l’obligation précontractuelle du professionnel. Examinons plus en détail chacun d’entre eux.

 Dans l’arrêt du 15 mai 2002, Mme Cardoso a acheté un véhicule automobile auprès de M. Guillot, garagiste. L’acheteuse s’est très vite aperçue que le véhicule avait été accidenté. En référé, une expertise a confirmé les soupçons de Mme Cardoso. Cette dernière demande ainsi la nullité de la vente pour réticence dolosive du fait que M. Guillot a dissimulé cet élément lors de la formation du contrat. La Cour d’appel rejette cette demande au motif que l’acquéreur ne rapporte pas la preuve de la dissimulation. Saisie d’un pourvoi, la Cour de cassation devait donc dire si la charge de la preuve repose en effet sur le créancier de l’obligation d’information ou au contraire sur le débiteur de celle-ci. La Haute juridiction casse finalement l’arrêt rendu considérant que le professionnel est tenu d’une obligation de renseignement à l’égard de son client et qu’il lui incombe de prouver qu’il a exécuté cette obligation.

 Dans l’arrêt du 17 janvier 2007, une promesse de vente portant sur une maison a été signée entre l’acquéreur M. X, marchand de biens, M. Y., vendeur, agissant en tant que particulier.  Ce dernier estimant avoir promis la cession de son bien immobilier à un prix inférieur à celui du marché refuse de signer l’acte authentique. La Cour d’appel lui donne raison, puisqu’elle considère que M. Y ne pouvait lui-même connaitre le prix de sa maison et que M. Y en qualité de professionnel était tenu d’un devoir de loyauté, auquel il a manqué en ne délivrant pas une information essentielle à son cocontractant (à savoir le prix de l’immeuble). La Cour de cassation devait se prononcer sur la question de l’existence d’une obligation d’information sur la valeur du bien acquis par l’acheteur professionnel. La troisième chambre civile censure l’arrêt d’appel en affirmant que l’acquéreur même professionnel n’est pas tenu d’une obligation d’information au profit du vendeur sur la valeur du bien acquis.

 Par ces deux arrêts la Cour de cassation apporte ainsi les précisions suivantes :

-         Le vendeur professionnel est débiteur d’une obligation d’information au profit de l’acquéreur ; la preuve de l’exécution de cette obligation pèse sur le professionnel

-         L’acquéreur professionnel n’est en revanche pas tenu d’une obligation d’information sur la valeur du bien acquis même à l’égard d’un profane.

 Aussi selon que le professionnel agisse en tant que vendeur ou en tant qu’acquéreur, l’intensité de l’obligation d’information varie. Elle est pleine et entière dans le premier cas (I), elle est restreinte dans le second cas et même inexistante quand elle porte sur la valeur du bien acquis (II).

I –  Une obligation d’information du vendeur professionnel pleine et entière

Présentation des sous-parties

A – le rappel du principe

Dans l’arrêt du 15 mai 2002 : rappel de cette obligation dans le premier temps de l’attendu de principe de la Cour de cassation. Même si la décision porte surtout sur la question de la preuve (cf. visa art. 1315), la Haute juridiction en profite pour faire une piqure de rappel.

Cette obligation d’information impose au professionnel de renseigner l’acquéreur sur tout élément pertinent participant à l’expression du consentement. Ce qui est sanctionné, c’est le fait de garder le silence sur une information que l’autre partie aurait intérêt à connaitre. En l’espèce, véhicule accidenté (confirmation par expertise).

Sanction : passage du dol à une obligation d’information, dont le régime est autonome par rapport à la réticence dolosive (« forme moderne du dol » pour P. CHAUVEL) admise sur le fondement du dol. Nul n’est besoin d’apporter la preuve de l’intention de nuire ou de tromper l’autre (objectivation, absence d’élément intentionnel).

 
Reste néanmoins à définir la charge de la preuve. Preuve de l’élément matériel.

B – le renversement de la charge de la preuve


Selon les principes de la procédure civile française, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention (art. 9 CPC) : en vertu de ce texte, c’est sur le créancier de l’information que devrait reposer la charge de la preuve, donc sur l’acquéreur.

Néanmoins, s’agissant d’un fait négatif, la jurisprudence admet depuis un arrêt de 1997 que celui qui est légalement ou contractuellement tenu d’une obligation particulière d’information doit rapporter la preuve de l’exécution de cette obligation (Civ 1ère, 25 février 1997). Les juridictions opèrent donc renversement de la charge de la preuve.

Opportunité de ce choix. Dans l’arrêt de 2002, la Cour de cassation censure logiquement les juges d’appel au motif qu’ils ont fait reposer la charge de la preuve du défaut d’information du caractère accidenté du véhicule sur l’acquéreur. En réalité, c’est au garagiste tenu de cette obligation de prouver qu’il a exécuté cette obligation.

Choix favorable à l’acheteur. On est en présence d’une réticence dolosive : la victime n’a plus à montrer l’intention de nuire de l’auteur du dol et n’a même plus à apporter la preuve de l’élément matériel. Passage du dol à une obligation d’information autonome.

Choix assez raisonnable au vue des difficultés pour l’acquéreur à apporter la preuve du défaut d’information.

La preuve est certainement aussi difficile à apporter pour le professionnel mais à lui de se protéger lors de la phase de formation du contrat au besoin en apportant les précisions nécessaires dans un acte écrit.

Source juridique de la décision.

Reprendre le visa. 1315 :

Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

On peut douter de la bonne application du texte en l’espèce puisqu’ici le demandeur n’agit pas pour demander l’exécution d’une obligation mais pour obtenir la nullité du contrat.

La décision semble donc sur ce point insatisfaisant.

 Mais qu’importe les moyens pourvu qu’on est à la fin, doit se dire la Cour de cassation. Ce qui compte c’est de protéger le consentement du profane.

 
Ce principe a des limites, limites que l’on observe dans la situation où le profane est en position, non plus d’acquéreur mais de vendeur.


II – Une obligation d’information de l’acquéreur professionnel limitée

Dans l’arrêt du 17 janvier 2007, la Cour exonère l’acquéreur professionnel d’une obligation d’information portant sur la valeur du bien acquis (A). Mais il serait erroné de penser qu’est affirmé ici un principe général d’exclusion de l’obligation d’information de l’acquéreur professionnel (B).

A -  L’exclusion de l’obligation sur la valeur du bien

Dans l’arrêt Baldus, la Cour de cassation a affirmé que l’acquéreur d’un bien n’est aucunement tenu de révéler à son vendeur la valeur de la chose qu’il entend acquérir (Civ. 1ère, 3 mai 2000). Pas d’obligation d’information sur la valeur véritable de la chose donc, et pas non plus de devoir de mise en garde contre le risque d’une mauvaise affaire. Pour cause, puisque l’acquéreur lui-même est sur le point de faire une très bonne affaire.

L’arrêt de 2007 est un intéressant prolongement de la jurisprudence Baldus puisque l’acquéreur en question n’est pas un particulier mais un professionnel.

La Cour de cassation pouvait-elle revoir sa position ?

-         Référence à Com. 27 février 1996 ? (réticence dolosive d’un dirigeant de société qui en acquérant des actions du capital d’une entreprise n’avait pas révélé à son vendeur des éléments de valorisation des titres).

-         La motivation de la Cour d’appel semblait même d’un grand renfort pour le vendeur (précision sur sa situation et celle de son épouse).

Mais celle-ci n’emporte pas la conviction de la Cour de cassation, elle poursuit la jurisprudence Baldus. L’acquéreur, même professionnel, n’est pas tenu d’une obligation d’information sur la valeur de la chose achetée.

Reprise de la position classique des tribunaux : adage emptor debet esse curiosus. Rien n’empêchait le vendeur, même profane de s’informer sur la valeur réelle de sa maison, d’effectuer les démarches nécessaires en ce sens (éventuelle estimation gratuite préalable du bien, renseignements pris auprès de son notaire…). L’erreur provoquée n’est pour ainsi dire par excusable…


B – le principe a priori non exclu

La Cour de cassation prend néanmoins le soin de préciser (au moins implicitement) que le principe d’exonération du devoir d’information de l’acquéreur professionnel concerne la précision faite sur la valeur du bien. Que rien n’exclut dès lors une application dans d’autres circonstances dès lors qu’elles peuvent être déterminantes.

Pour une application : Civ. 3ème, 15 novembre 2000, sur la richesse du sous-sol ignorée  du vendeur mais connue de l’acquéreur. 

Aborder la question de la lésion (le vendeur n’est pas sans protection)

TD personnes - Pour la séance 3, faire la dissertation de la fiche


mercredi 24 octobre 2012

Sécurité sociale : une question de priorité ?

Pendant que certains polémiquent sur l'emploi des chiffres n° 1 (pour l'homme) et 2 (pour la femme) par la Sécurité sociale et demandent leur suppression (source Libération du 23 octobre 2012)...


... La Commission européenne semble proche d'assouvir un de ses vieux fantasmes : l'ouverture des régimes de sécurité sociale à la concurrence ! http://www.mediapart.fr/journal/international/091012/bruxelles-veut-ouvrir-la-securite-sociale-au-prive

mardi 23 octobre 2012

Séance 3 droit des obligations - Les vices du consentement


Théorie classique des vices du consentement repose sur la trilogie : erreur, dol, violence
Mesures curatives de protection du consentement

 Partir de l’article 1108 C. civ : sur les quatre conditions de validité d’un contrat ; parmi elles, « un consentement de la partie qui s’oblige ».

Le consentement doit présenter certaines qualités. Il doit être libre et éclairé. Exigence énoncée sous forme négative à l’article 1109.

 Section 1 du Chapitre 2 du Code consacrée particulièrement au consentement.

Art. 1109 : Il n’y a point de consentement valable, si le consentement n’a été donné que par erreur, ou s’il a été extorqué par violence ou surpris par dol.

Chaque vice du consentement est présenté « par un verbe à la valeur expressive particulièrement forte » (TERRE, SIMLER, LEQUETTE) :

-         Donné par erreur : l’erreur émane du contractant qui se dit victime

-         Extorqué par violence : extorquer qui signifie obtenir par la menace

-         Surpris par dol : l’idée de surprise renvoie à une manœuvre du cocontractant


Origines historiques de cette théorie : le droit romain considérait le dol et la violence comme des délits et visait à sanctionner la malhonnêteté d’un cocontractant (peu de considération pour le consentement car formalisme important à cette époque). Les juristes de l’Ancien droit ont repris à leur compte cet héritage romain en en modifiant toutefois le sens en faveur d’une protection du consentement contractuel. Le Code civil a opéré une synthèse de ces deux conceptions : « si la technique des vices du consentement est en son sein essentiellement appréhendée comme un moyen de protection de la volonté, l’aspect délictuel n’a pas totalement été évincé, altérant parfois la cohérence des règles juridiques » (Porchy-Simon).

Impératifs contradictoires de politique juridique dans l’appréciation des vices du consentement :

-         nécessité de protection du consentement = admission très large de la nullité pour vices.

-         sécurité juridique, dans les relations contractuelles = retenir cette sanction que dans les cas les plus graves d’altération de la volonté.

Là aussi, un compromis : « transaction entre le souci d’une part de ne donner d’efficacité à un engagement contractuel que s’il correspond à la volonté réelle de celui qui l’a pris, et d’autre part celui de mettre le contractant à l’abri d’une nullité qu’il ne pouvait prévoir » (TERRE).

Concrètement cela passe une délimitation du domaine de l’erreur.

Cela apparait clairement à la lecture de l’article 1110 : « l’erreur n’est une cause de nullité que lorsqu’elle tombe… . Elle n’est point une cause de nullité … ». Volonté de circonscrire le domaine de l’erreur. Le législateur n’entend pas prendre en compte toutes les bévues ou naïvetés d’un contractant.

1° L’erreur

Deux types d’erreur sont ainsi admises par les textes : l’erreur sur la substance de la chose et l’erreur sur la personne lorsque cette personne est la cause principale de la convention.

Notons cependant que même si le Code ne les mentionne pas, l’erreur sur la nature du contrat (l’un croyait qu’il s’engageait dans un contrat de vente et l’autre un contrat de bail) et l’erreur sur l’objet du contrat (l’un croyait contractait en euros, l’autre en francs) invalident la convention. Elles doivent même être considérées comme des erreurs-obstacles. Ces contrats résultent d’un quiproquo, d’une incompréhension totale entre les deux contractants.

a – erreur sur la substance :

Deux conceptions :

-         conception objective : classiquement, cette conception renvoie à la qualité substantielle de la chose correspond à la matière dont la chose est faite. Cette conception a le mérite d’offrir un critère précis, mais elle est trop étroite. Les partisans de la conception objective ont donc adapté leur théorie, en retenant comme critère de distinguer pour chaque chose la qualité considérée comme substantielle pour la majorité des hommes

-         conception subjective : renvoie à la qualité jugée telle par celui qui s’est trompé, celle qui l’a déterminé à contracter.

La jurisprudence tend davantage à promouvoir la seconde conception. « L’erreur doit être considérée comme portant sur la substance lorsqu’elle est de telle nature que sans elle l’une des parties n’aurait pas contracté » (Civ., 28 janvier 1913). Cela peut donc tout aussi bien porter sur la matière de la chose (j’achète un bijou en argent alors que celui-ci est en oxyde de zirconium), que sur son authenticité (je pense acheter un original alors qu’il ne s’agit qu’une copie), que sur son aptitude à remplir l’usage auquel celui qui s’est trompé la destinait (j’achète un terrain qui se révèle être finalement inconstructible).

 Notons que les deux conceptions sont finalement assez proches l’une de l’autre : d’abord, parce qu’un individu acquiert le plus souvent un bien en fonction de la matière qui le constitue, ensuite parce le plus souvent la qualité qui a été déterminante pour le contractant l’est aussi pour la majorité des hommes (le contraire rendrait périlleux la preuve des qualités substantielles).

 Preuve de la qualité considérée comme substantielle : il faut que cette qualité ait été « convenue » entre les parties (GHESTIN). Le doute sur l’authenticité de la chose peut être intégré dans le champ contractuel : l’aléa chassera alors l’erreur  (Civ. 1er, 24 mars 1987, aff. du Fragonard).

 

b – l’erreur sur la personne :

cf. art. 1110 al 2.

NB : L’erreur doit être excusable. Cela implique deux choses => 1° le contractant doit avoir pris toutes les précautions nécessaires avant de s’engager, ne pas le faire avec négligence. 2° appréciation in concreto du caractère inexcusable de l’erreur en fonction des qualités de la personne.

Sanction de l’erreur : nullité relative. En principe pas de D/I.

Si l’erreur est une erreur spontanée, l’erreur provoquée constitue un dol.


2° Le dol

Dans le dol, le contractant n’est pas trompé, on l’a trompé.

Différentes entre le dol et l’erreur :

-         domaine plus large du dol : les erreurs indifférentes et non sanctionnées sur le fondement de l’erreur (ex : erreur sur la valeur) sont sanctionnées lorsqu’elles ont été provoquées par dol

-         sur la preuve : la preuve du dol, beaucoup plus facile, porte sur les manœuvres (fait matériel), alors que celle de l’erreur porte sur la croyance erronée (fait psychologique). 

-         Sur la sanction : en principe de pas de D/I pour l’erreur

La notion de dol porte en elle l’idée romaine du délit. En effet, pour être constitué, le dol doit reposer sur un élément matériel (manœuvres, mensonges, réticence dolosive) mais également sur un élément intentionnel, à savoir la volonté de tromper l’autre (difficile à établir dans le cas dans la réticence dolosive). C’est pourquoi le dol doit émaner du cocontractant.

En plus d’émaner du cocontractant, le dol doit avoir été déterminant (abandon progressive de la distinction dol principal/dol incident (Cf. Civ. 3ème, 22 juin 2005)). En revanche, l’erreur provoquée n’a pas à être excusable.

Evolution du dol : par l’admission de la réticence dolosive qui crée une obligation précontractuelle d’information à l’égard des contractants. Le dol peut être alors assimilé à l’exigence de bonne foi.

 

3° la violence

Plus simple à comprendre (art. 1111 et s.).

Elle peut être physique, morale (pressions psychologiques) ou économique (abus de puissance économique du cocontractant).

Evolution de la violence : la violence économique. Admise depuis peu par la Cour de cassation (Civ.1ère, 3 avril 2002). L’exploitation abusive d’une situation de dépendance économique faite pour tirer profit de la crainte d’un mal menaçant directement les intérêts légitimes de la personne, peut ainsi vicier de violence son consentement. (déterminer 1° une situation de dépendance économique ;  2° une exploitation abusive de cette situation)

 Notons que contrairement au dol, l’auteur de la violence est indifférent.

 Mais, la violence doit être illégitime : l’acte constitutif de violence ne doit pas être autorisé par le droit positif (ex : exercice des voies de droit ou du droit de grève). Ainsi, la situation objective de domination économique d’une partie sera le plus souvent dépourvue de caractère illégitime. De plus, la violence doit être déterminante : la violence doit avoir altéré le consentement du cocontractant. Même si l’art. 1112 est ambigu sur ce point, les juges se livrent ici à une appréciation in concreto : prise en compte de la condition physique et intellectuelle de la victime, son âge ou toute autre circonstance particulière.

 Rq : violence peut entrainer la nullité alors même qu’elle n’a pas été exercée sur la partie directement mais sur « son époux ou épouse, sur ses descendants ou ses ascendants » Art. 1113.
 
 
Elements de correction du cas pratique
 
I. L’annulation de la vente du tableau :
Monsieur Robert a vendu, lors d’une brocante, un tableau d’un dénommé Martin pour la somme de 300 euros. Or il apprend quelques mois après que ce tableau était en fait une œuvre de Gauguin. Il souhaite savoir s’il a la possibilité de récupérer son tableau et quels sont ses moyens d’action.
Il convient, préalablement, de déterminer la nature de l’acte passé entre M. Robert et Mme Zara.
Au terme de l’article 1101 du Code civil, « le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs parties s’obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose ».
En outre, l’article 1582 du Code civil dispose : « La vente est une convention par laquelle l’un s’oblige à livrer une chose, et l’autre à la payer ».
En l’espèce, M. Robert a vendu un tableau à Mme Zara lors d’une brocante. Il s’agit donc bien d’un contrat de vente.
Or, on sait que, conformément aux dispositions de l’article 1108 du Code civil, quatre conditions sont essentielles pour la validité d’une convention :
- Le consentement de la partie qui s’oblige ;
- Sa capacité de contracter ;
- Un objet certain qui forme la matière de l’engagement ;
- Une cause licite dans l’obligation.
En l’espèce, trois de ces quatre conditions cumulatives semblent remplies : rien n’indique que les parties n’avaient pas la capacité de contracter, et la volonté des parties semble assise sur un objet certain et motivée par une cause licite.
En revanche, on peut se demander si le consentement d’une des parties, condition essentielle du contrat, n’a pas été vicié.
En effet, on sait qu’« il n’y a point de consentement valable, si le consentement n’a été donné que par erreur, ou s’il a été extorqué par violence ou surpris par dol » (art. 1109 C. civ).
On peut d’ores et déjà exclure le dol qui, au terme de l’article 1116 du Code civil, n’est cause de nullité de la convention que lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties sont telles qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté. En effet, il ne semble pas en l’espèce que Mme Zara ait visé à induire M. Robert en erreur afin de le pousser à contracter. S’il y a eu erreur de M. Robert, celle-ci n’a pas été provoquée, de telle sorte que les éléments constitutifs du dol ne sont pas réunis.
De même, on peut exclure la violence, envisagée par les articles 1111 et suivants du Code civil, qui est une pression exercée sur le contractant pour le contraindre à donner son consentement.
En revanche, qu’en est-il de l’erreur ?
On sait qu’elle est, dans le sens courant, l’état de celui qui prend pour vrai ce qui est faux, et inversement. Appliquée au domaine contractuel, elle consiste en une fausse représentation de l’objet du contrat, conduisant à une discordance entre la croyance de l’errans (celui qui s’est trompé) et la réalité. Elle vicie alors le consentement qui n’est plus éclairé.
Le Code civil admet différentes sortes d’erreurs (erreur sur la substance, erreur sur la personne et, dans une moindre mesure, erreur obstacle) qui ne conduisent cependant à la nullité du contrat qu’à la condition de présenter certains caractères.
En l’espèce, M. Robert a vendu pour 300 euros un tableau dont il ignorait manifestement que Gauguin en fût l’auteur.
Selon l’article 1110, alinéa 1er, du Code civil,« l’erreur n’est une cause de nullité de la convention que lorsqu’elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l’objet ».
On notera que l’erreur sur la substance s’entend non seulement de celle qui porte sur la matière même dont la chose est composée, mais aussi et plus généralement de celle qui a trait aux qualités substantielles (authenticité, origine, utilisation…) en considération desquelles les parties ont contracté.
En outre, l’erreur sur l’authenticité d’un tableau est une erreur sur la substance et non une simple erreur sur la valeur (Paris, 28 juin 2001). Or, l’erreur substantielle qui a provoqué l’erreur sur la valeur peut fonder l’annulation (Paris, 11 sept. 1990).
En l’espèce, il y a bien erreur sur la substance (le tableau, attribué à un dénommé Martin, étant en réalité l’œuvre de Gauguin). Mais, on l’a dit, l’erreur ne conduit à la nullité du contrat qu’à la condition de présenter certains caractères.
Notons qu’il importe de déterminer quelle a été la croyance des contractants au moment de la vente. Lorsqu’au départ, le vendeur et l’acheteur avaient un doute sur l’originalité de l’œuvre, cela suffit à établir que leur consentement n’était pas vicié : en effet, l’aléa chasse l’erreur (Civ. 1ère, 24 mars 1987, « Fragonard »).
En l’espèce, il n’y avait aucun aléa. M. Robert n’a pas pensé une seule seconde que ce tableau fût celui d’un grand maître. Son erreur est donc déterminante : l’appréciation du caractère déterminant de l’erreur est opérée par le juge in concreto, et si ce caractère déterminant s’apprécie au jour où le consentement a été donné, les parties peuvent utiliser, pour apporter cette preuve, des éléments postérieurs à la conclusion du contrat (Civ. 1ère, 13 décembre 1983,« Poussin »).
Enfin, son erreur est excusable : une jurisprudence constante refuse d’annuler le contrat pour erreur si celle-ci était la conséquence d’une faute de l’errans (voir, notamment : Civ. 3ème, 4 juillet 2007). En l’espèce, M. Robert n’est pas un professionnel, mais un profane ayant décidé de vendre un tableau à la suite d’un vide-grenier. Il ne présente pas non plus de qualités particulières dans le domaine de l'art.
Conclusion : M. Robert pourra donc demander l’annulation de la vente sur le fondement de l’article 1110 du Code civil. Le tableau lui sera remis, et il devra rembourser Mme Zara.
II. L’annulation de la vente de la maison :
M. Robert a acquis une maison auprès d’un promoteur immobilier. Mais il apprend quelques mois plus tard que la commune possède un terrain jouxtant son jardin et envisage d’y construire un complexe sportif. Anxieux à l’idée des nuisances qu’il risque de subir (bruit, absence de vue), il souhaiterait savoir s’il est possible d’obtenir l’annulation de la vente de la maison.
Là encore, il convient de déterminer la nature de l’acte passé entre M. Robert et le promoteur immobilier.
Il s’agit d’un contrat de vente (art. 1582) dont on sait qu’il ne peut être valide qu’à condition que quatre conditions soient réunies (art. 1108).
Or, en l’espèce, l’une d’entre elle fait peut-être défaut.
En effet, on sait qu’« il n’y a point de consentement valable, si le consentement n’a été donné que par erreur, ou s’il a été extorqué par violence ou surpris par dol » (art. 1109 C. civ).
Si l’on peut exclure l’erreur et la violence, il est peut-être possible de retenir le dol qui, au terme de l’article 1116 du Code civil, n’est cause de nullité de la convention que lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties sont telles qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté.
Le dol suppose la réunion de deux éléments : un élément matériel et un élément intentionnel.
L’élément matériel peut résulter de manœuvres, de mensonges, mais peut aussi résulter du silence d’une partie sur un élément d’information relatif au contrat qui, s’il avait été connu, aurait dissuadé l’autre de contracté. On parle alors de réticence dolosive, laquelle est admise depuis longtemps (Civ. 1ère, 19 mai 1958) et constitue aujourd’hui la forme la plus courante du dol.
En l’espèce, si M. Robert avait eu connaissance du projet de construction d’un complexe sportif sur le terrain jouxtant le jardin de la maison, sans doute n’aurait-il pas contracté.
Reste à savoir si le vendeur était au courant de ce projet.
S’il ne l’était pas, alors le dol n’est pas constitué et M. Robert ne pourra demander l’annulation de la vente.
S’il l’était, en revanche, alors le silence qu’il a gardé est constitutif d’un dol.
La jurisprudence considère que le vendeur professionnel est tenu d’une obligation de renseignement à l’égard de son client, opérant ainsi un renversement de la charge de la preuve de l’élément intentionnel du dol (Civ. 1ère, 15 mai 2002) : ainsi, ce sera au promoteur immobilier de démontrer qu’il n’était pas au courant du projet. A défaut de preuve contraire, il sera présumé ne pas avoir délivré l’information, et avoir donc commis un dol.
M. Robert pourra, le cas échéant, demander l’annulation de la vente sur le fondement de l’article 1116 du Code civil, mais également engager la responsabilité de l’agent immobilier sur le terrain de l’article 1382.