Rappel méthode du cas pratique. Trame :
1° Bref rappel des faits (qualification juridique)
2° Question de droit
2° Règle(s) de droit, principe tiré (exceptions éventuelles) + explication
4° Application de la règle de droit aux faits
5° Réponse à la question de droit
Eléments de correction cas pratique n°1 :
(1°) Nous sommes en présence d'un contrat de vente ayant pour objet la vente d'une maison, d'un jardin et des terres agricoles. Le contrat de vente emporte transfert de propriété entre le vendeur. M. Pierre est donc devenu propriétaire de l'ensemble des biens immobiliers prévus au contrat.
(2°) La question se pose ici de savoir si certains biens qui entretiennent un lien étroit avec les immeubles vendus sont inclus ou non dans la vente ; autrement dit, il s'agit de déterminer si par l'effet de la vente, M. Pierre est également devenu propriétaire des biens litigieux.
A défaut de stipulations contractuelles plus précises, il convient de s'en référer aux articles 516 et s. du Code civil.
1 - La fontaine en pierre.
Cette fontaine en pierre a été sculptée par l'acquéreur lui-même lors de son arrivée.
(3 et 4°) Le droit distingue les biens meubles des biens immeubles (516). Les biens meubles sont ceux qui peuvent être déplacés, alors que les immeubles concernent le sol et les choses qui y sont fixés. D'emblée, on peut donc exclure la qualification de bien meuble. En effet, la fontaine est indissociable du rocher, elle y est sculptée. De même que ne peut être envisagée la catégorie des biens immeubles par destination dans la mesure où la fontaine n'a jamais été un meuble (exclusion de 525 : effets mobiliers attachés à son fonds à perpétuelle demeure).
Il en découle que le bien litigieux est un immeuble par nature. En effet, un bien immeuble par nature peut être défini comme un bien fixe, ou un bien qui s'incorpore à un immeuble.
La jurisprudence a confirmé « que les améliorations apportées à un fonds de terre par les pratiques culturales qui ne peuvent être matériellement dissociées du fonds de terre (…) sont des immeubles par nature » (Com. 24 mars. 1981).
(5) La fontaine en question ne peut donc être récupérée par M. Jacques. Elle demeure la propriété de M. Pierre.
2 – Les dix ruches
Selon l'art. 527, les biens sont meubles par leur nature ou par la détermination de la loi. Par principe, un bien meuble peut être déplacé par la force de l'homme.
L'art. 528 précise que sont meubles par nature les animaux qui peuvent se transporter d'un lieu à un autre, soit qu'ils se meuvent pas eux-mêmes, soit qu'ils puissent changer de place que par l'effet d'une force étrangère. En l'espèce, une ruche peut évidemment être déplacée par la main de l'homme. Les biens en question peuvent donc être considérés comme des meubles par nature.
Néanmoins, un ensemble de biens peut former un tout, une universalité, soit comme une entité juridique complexe entendue dans sa globalité (meubles + immeubles). En l'espèce, M. Jacques a cédé un ensemble de biens meubles et des biens immeubles à M. Pierre. Il faut donc considérer le tout comme un fonds agricole.
A cet égard, un bien meuble peut être considéré comme un immeuble en raison de son lien avec un immeuble dont il constitue l'accessoire (immeuble par destination – art. 517).
Ainsi, l'article 524 contient une liste de biens, immeubles par destination, lorsqu'ils sont placés « pour le service et l'exploitation du fonds ». Le texte vise notamment « les ruches à miel ».
En l'espèce, il est question d'une dizaine de ruches, très certainement destinées à la production de miel au service du fonds. Il en découle que ces biens doivent être qualifiés de biens immeubles par destination et rattachées aux terres agricoles.
M. Jacques ne peut donc valablement en revendiquer la propriété.
3/4 – Les six tonneaux en chêne et les tracteurs
Sans qu'il soit nécessaire de reprendre le raisonnement développé pour la question des ruches, il convient d'apporter la même réponse quant au sort des six tonneaux en chêne et des tracteurs. Les premiers permettent d'élever le vin, les seconds de cultiver les terres. Il s'agit donc de biens immeubles par destination, dont la propriété échoit à M. Pierre.
5- Les statues posées à même le sol dans le jardin
Rappeler art. 528 : les corps qui peuvent se transporter d'un lieu à un autre sont meubles par nature.
En l'espèce, les statues ne sont ni scellées, ni fixées. Elles peuvent donc être déplacées. Par ailleurs, elles ne sont nullement utiles à l'utilisation du fonds (écarter la qualification d'immeuble par nature). Par conséquent, il faut retenir la qualification de meuble par nature.
Ce qui signifie que M. Pierre pourra les récupérer.
6 – Statue de la vierge
Rappeler l'art. 525 (dernier alinéa). Contrairement aux statues posées à même le sol, la statue de la vierge est située dans une niche spécialement prévue à cet effet. Une statue scellée ou placée dans une niche aménagée pour la recevoir doit être qualifiée d'immeuble par destination (Civ. 3ème, 3 juillet 1968).
M. Pierre est donc propriétaire de cette statue.
7 – Huit grands vases
Huit grands vases sont posés dans le jardin sur des socles, de façon symétrique et formant une figure géométrique.
1ère étape du raisonnement : Art. 528 : les vases sont des biens meubles puisque déplaçables.
2nde étape : Mais un meuble qui s'inscrit dans un ensemble de biens et qui entretient un lien étroit avec un immeuble peut recevoir la qualification d'immeuble par destination.
S'interroger sur l'intention du vendeur. Art. 525 : A-t-il voulu attacher les objets au fonds à perpétuelle demeure ? Le fait qu'ils soient posés sur des socles et qu'ils forment une figure géométrique semblent l'indiquer. Cette question relèvera de l'appréciation des juges du fond (cf TGI Poitiers, 23 avril 1968 : dans le même cas de figure, le juge a estimé que l'ensemble formait un ensemble ornemental pour la décoration d'un parc et donc en a conclu qu'il s'agissait d'immeubles par destination).
A discuter.
Enfin la question des miroirs doit faire l'objet du même raisonnement que pour les huit grands vases.